Loin de la polémique, LA VIE D'ADELE arrive enfin sur les écrans. Le résultat est un film trop long, sans aucune subtilité ni émotion. Dommage pour un sujet qui méritait bien mieux. Reste la révélation Adèle Exarchopoulos.
Autant trancher dans le vif dès le départ, LA VIE D’ADELE a été une vraie déception. Et pourtant c’était un film que l’on avait vraiment envie d’aimer. La polémique qui a entouré
la promotion du film n’y est pour rien, c’est juste que la réalisation d’Abdélatif Kéchiche a complètement détruit la sensibilité et la finesse du matériau de base, l’excellent roman graphique de
Julie Maroh, LE BLEU EST UNE COULEUR CHAUDE.
Petit rappel des faits. Dans son œuvre, Maroh décrit l’éveil à l’homosexualité de la jeune Clémentine (rebaptisée Adèle dans le film) et dépasse très vite ce postulat de base pour décrire une
histoire d’amour universelle sans jamais verser dans l’exhibitionnisme. Rarement une bande dessinée aura provoqué autant d’émotion et le public du festival d’Angoulême ne s’y était pas trompé en
2011. Que reste-t-il de tout ça devant la caméra de Kéchiche ? Pas grand-chose.
En surlignant chaque élément du scénario, en étirant les scènes au-delà du raisonnable, le réalisateur assène un discours avec la subtilité d’un mammouth. Quel besoin d’un tel didactisme (chaque
passage est auparavant expliqué à travers l’étude d’une œuvre littéraire) alors que le propos se suffisait à lui-même ? Au final, le film regorge de séquences inutiles et fait, au bas mot, une
heure de trop. Adepte d'un certain naturalisme, Kéchiche sembe parfois oublier de faire du cinéma. Les scènes d’amour entre Adèle et Emma, finissent par n’être qu’un étalage de chair sans
passion. Le discours de Kéchiche n’évite aucun parti pris ridicule. Le pire étant l’opposition entre les deux familles des jeunes filles. D’un côté les prolos qui se régalent de pâtes à la
bolognaise et de vin de table, et de l’autre les bobos tolérants qui ne jurent que par les fruits de mer et le vin raffiné. On a déjà vu plus subtil. Et que dire de dialogues cryptiques
lourdingues à base de « J’adore gober les huitres »… Bref, trois heures interminables où jamais l’émotion ne pointe le bout de son nez. Quant à la description d’un amour lesbien, il
transporte avec lui autant de clichés qu’une discussion de bar sur le même sujet.
Reste une interprétation sans faille. Adèle Exarchopoulos explose à l’écran. Et même si on a envie de lui hurler de prendre un kleenex dans la moitié de ses scènes, sa présence est indéniable.
Kéchiche n’a d’ailleurs pas réussi à dépasser sa fascination pour sa muse qui est de tous les plans et dont la contemplation prend le dessus sur les enjeux narratifs. Dans un rôle plus ingrat Léa
Sédoux n’évite pas certains clichés mais emporte également l’adhésion.
Au final, un film qui ravira les adeptes de Kéchiche mais qui aura du mal à toucher ceux qui ont aimé LE BLEU EST UNE COULEUR CHAUDE. Ici, nous avons choisi notre camp.