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Le Bertyblog

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Passionné de comics et de cinéma, geek à ses heures, sportif dans une autre vie, Le Berty aime poser un regard amusé sur le monde qui l'entoure. Et c'est pas toujours facile...


DAVID BOWIE ET MOI

Publié par Le Berty sur 11 Janvier 2016, 17:09pm

DAVID BOWIE ET MOI

Le jour où on allait devoir vivre dans un monde sans David Bowie devait bien arriver. On avait beau se préparer, on ne pensait tout de même pas que cela arriverait deux jours après la sortie d’un nouvel album. Car dans une dernière pirouette dont il avait le secret, David Bowie est définitivement devenu cette Blackstar qui brillera à jamais dans un ciel tourmenté.

L’histoire entre David Bowie et moi (oui, vous ne le savez sûrement pas mais il y a bien eu une histoire entre la star et l’anonyme) a débuté en 1983. Oui, l’année de LET’S DANCE, cet album qui lui a valu la reconnaissance du très grand public et qu’il fut de bon ton de railler durant des années. En 1983, j’avais encore un pied dans l’enfance alors que l’autre cherchait le chemin vers l’adolescence. Autant dire que mes goûts musicaux étaient pour le moins embryonnaires et loin de toute exigence. Dans mon walk-man il n’y avait qu’un vague gloubiboulga de chansons enregistrées sur les disques de mes parents et de vestiges des 45 tours sur lesquels étaient gravés les génériques de Goldorak et d’Albator.

Mais un jour je tombais sans y être préparé sur le clip de LET’S DANCE. Un Anglais peroxydé y chantait avec une classe folle dans le bush australien. Il était beau et je prenais ma première claque musicale. J’ai dû tellement bassiner mes parents avec ce fameux Bowie qu’un jour je trouvais la K7 de LET’S DANCE sur mon bureau en rentrant de l’école. J’allais l’user jusqu’à la corde, étudiant chaque nuance dans la voix de celui qui était devenu indispensable à mon bonheur. Au point de gâcher mes seules chances avec la belle Agnès lors d’une sortie scolaire. Alors que j’étais enfin assis à côté d’elle et que j’avais une bonne heure pour tenter une approche, je n’avais pu lui parler d’autre chose que de la différence entre les morceaux contenus dans l’album et ceux en version radio (les fameux Edit). Vous aurez deviné qu’il ne se sera jamais rien passé entre nous. Avec le beau David, en revanche, c’était différent. Surtout que le clip suivant, celui de CHINA GIRL sentait le souffre. Il était réservé à une heure tardive, pendant le Sex Machine de Dionnet et Manœuvre dans les Enfants du Rock. Déjà, suivre Bowie c’était (un peu) être transgressif.

DAVID BOWIE ET MOI

C’est comme ça, je suis légèrement complétiste. Alors en attendant un nouvel album, je me plongeais dans l’œuvre passée de Bowie. Je plongeais alors dans le concert d’adieux de Ziggy à l’Hammersmith, je découvrais les improvistations au piano de Mike Garson sur Aladdin Sane. Cela ne m’empêchait pas d’apprécier TONIGHT à sa sortie. Depuis, je suis assez d’accord avec tout le monde, c’est un des pires albums de Bowie. Bref, j’étais devenu fan. Mes copains de l’époque ne juraient que par Michael Jackson et quand je leur disais que FURYO était un film formidable, on me répondait que c’était un film de tapettes. Je m’en fichais. Bowie avait cette première influence sur moi qu’il m’autorisait à être différent et à tolérer la différence. A commencer par la différence sexuelle. Sans une approche guidée par Bowie, j’aurais très bien pu me marrer aux réflexions de vestiaires sur les homos. Au lieu de cela, j’ai appris la tolérance. Et la différence m'est devenue normale.

Etre un jeune fan de David Bowie, c’était aussi décider de mettre des costumes et de pratiquer une certaine élégance à un âge où il est plus facile de se promener en survêtement Compagnie de Californie. Heureusement pour moi, j’étais arrivé après la période strass et paillettes. Mais quand même, je n’oublierai pas le sermon avec regards appuyés du directeur de mon école sur le fait de ne pas chercher à se démarquer. Ce jour là, je portais un superbe blazer avec un écusson anglais qui me rappelait celui du SERIOUS MOONLIGHT TOUR. Entouré de blousons et de vestes de survêtement, je me jurais de ne pas abdiquer. Même si je n’ai jamais eu la classe fatale du Thin White Duke.

Bien sûr, j’ai écouté une quantité ahurissante d’artistes jetables issus de l’industrie des années 80. Comment donner des leçons lorsqu’on a passé un été à faire tourner en boucle le TARZAN BOY de Baltimora ? Mais chaque fois que je lisais une interview de Bowie, je découvrais un nouveau courant musical. C’est en remontant jusqu’à la soul de YOUNG AMERICANS que je m’intéressais à la Motown. Le drum and bass après EARTHLING. Le rock indus après OUTSIDE (disque écouté à fond pour me laver d’une réalité qui ne me correspondait pas alors que je faisais mon service militaire). Car Bowie aura été un incroyable passeur, quelqu’un qui vous ouvrait la porte vers d’autres univers. Libre à vous de les essayer, de les adopter ou de les rejeter. Bref, Bowie est entré dans ma vie et m’a aidé à me doter d’une vision sans œillères sur le monde. Merci, David.

Des années plus tard, en 1995, je réalisais un rêve en assistant enfin à un concert de mon idole (je n'avais pas eu droit aux hippodromes des 80's). En Angleterre, et avec Morrissey en première partie. Mes première larmes durant un concert lorsque les premiers riffs de MOONAGE DAYDREAM ont retenti alors qu’il avait juré de ne plus jouer sur scène ses anciens morceaux. Plus tard, pour un concert à moitié privé à L’Olympia lors de la mini tournée accompagnant le superbe HEATHEN, je faisais six heures de queue (à partir de 4 heures du matin) pour obtenir mon précieux sésame. Ma chérie avait frappé à la porte de toutes les rédactions parisiennes pour savoir comment me faire rencontrer mon idole en coulisses. Peine perdue, bien évidemment, mais le geste était tellement touchant, vous en conviendrez. Il y a eu un Zénith en version best of et un dernier Bercy pour le REALITY TOUR. Bowie n’est plus remonté sur scène et il a fallu attendre dix ans avant d’avoir de ses nouvelles.

Dix où la vie a suivi son cours. Dix ans où Bowie était toujours présent malgré son absence. Et puis THE NEXT DAY a rallumé la flamme. Un album pop-rock qui reprenait les choses là où Bowie les avait laissée. Jusqu’à ce BLACKSTAR plus expérimental. Un album à contre-courant, sombre mais pas dénué d’espoir. Un album compliqué d’accès mais plaisant pour ceux qui suivent ce chemin depuis longtemps. Un album où on comprend enfin pourquoi le saxo est si omniprésent. Sachant probablement que ce serait sa dernière production, Bowie s’est fait plaisir. Comment lui en vouloir. On pouvait rêver à un nouveau départ vers un imaginaire débridé, même si j’avais peur de reconnaître sur son visage, dans ces deux derniers clips merveilleux, les stigmates de la maladie qui avait aussi emporté ma mère. Je ne voulais pas y croire. En fait, ce n’était pas un nouveau départ que Bowie préparait, mais bien le grand départ.

Aujourd’hui, il ne reste plus que la musique. Dans un sens, David Bowie ne mourra jamais. Il n’y a que pour ses proches qu’il a disparu à jamais. Sa femme, son fils, sa fille. Eux sont vraiment tristes. Moi, c’est autre chose. N’empêche qu’il va bien me manquer l’ange aux yeux vairons. Son étoile noire brillera à jamais dans mon ciel.

DAVID BOWIE ET MOI
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R
Excellent, ce texte... Du souffle, du rythme, du fond. Let's dance, amigo...
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